Janine Kotwica : Toutes ces rencontres en Picardie sont une sorte de retour aux sources puisque vous êtes né à Saint-Quentin ?
Gilles Bachelet : Oui, mais j’y ai peu vécu. En revanche, j’y ai conservé longtemps de la famille. Mes jeunes années, je les ai passées dans les Basses-Pyrénées, à Oloron-Saint-Marie, puis nous sommes remontés à Paris. Je suis entré en 6e au Lycée Henri IV, avec deux ans d’avance mais je n’étais guère assidu et je les ai vite perdus. J’ai redoublé, puis, devant la menace du triplement, mes parents m’ont envoyé en pension dans le Cotentin, au Collège oratorien de Saint-Lô, où je suis resté 7 ans.
Vous dessiniez déjà ?
Non, pas du tout. Ma vocation artistique n’a pas été précoce. Je voulais être vétérinaire et il reste quelques traces de cette envie dans mes livres ! Je n’étais pas bon en mathématiques, ni dans les disciplines scientifiques, et j’ai passé un baccalauréat littéraire. C’est à ce moment-là seulement que j’ai pris le goût de dessiner. Pourtant, j’ai toujours baigné dans le milieu car mon père était peintre.
J’ai tenté une première fois le concours d’entrée aux Arts Déco, en vain, et j’ai passé un an en faculté d’arts plastiques avant de retenter ce même concours et intégrer l’École nationale supérieure d’arts décoratifs. Ma scolarité a été chaotique. J’ai passé une année scolaire dans un bureau d’études en Iran. J’ai d’abord été inscrit en communication visuelle, puis en gravure. Je me suis vite constitué un dossier d’illustrateur et j’ai commencé à démarcher pour trouver du travail. Mon premier rendez-vous professionnel a été payant et L’Expansion m’a commandé ma première couverture. J’ai donc quitté l’ENSAD sans diplôme. C’était beaucoup plus facile à cette époque-là et je n’ose pas le raconter à mes étudiants. C’est presque indécent en regard des difficultés qu’ils rencontrent pour trouver un job.
Ne pensez-vous pas que ces difficultés soient aussi liées à la multiplication des écoles d’illustration et au nombre désormais très important des étudiants qui y sont formés et sont lancés sur le marché du travail ?
Difficile de répondre à cela. C’est vrai qu’il y a surproduction, mais, surtout, la polyvalence d’autrefois n’existe plus. Il n’y a guère de débouchés dans la presse ou la publicité. Les étudiants diplômés d’Emile Cohl ou des Arts Déco de Strasbourg font uniquement des albums jeunesse. Or, pour en vivre, il faut des tirages énormes, ou il faut en sortir cinq ou six par an, d’où la surproduction.
Est-ce que ces formations ne sont pas aussi, souvent, des formatages ?
Que dire ? C’est vrai que, lorsqu’on a eu un professeur qu’on a admiré, on peut être tenté de l’imiter.
Mais beaucoup de ces jeunes ont un talent personnel. C’est vrai qu’ils sont nombreux.
Peu d’illustrateurs le sont à plein temps. D’autre part, les animations en milieu scolaire sont souvent leur principale source de revenus. Là, c’est une dérive… On ne peut plus alors se donner le temps de mûrir un projet.
J’admire les gens qui, comme CLAUDE PONTI, avec une régularité de métronome, sortent un album par an. Un an pour creuser une idée originale sur laquelle on a envie de travailler, et avec un résultat d’une grande qualité.
Certains de vos confrères qui produisent beaucoup sont irréguliers dans la qualité…
On ne peut pas être génial à chaque fois, mais ceux qui ont fait de la pub ou de la presse sont entraînés dans une dynamique de recherche et de rapidité d’exécution…
Daniel Maja, grand dessinateur de presse, rend justice à ce défi du temps limité sur un sujet imposé qui provoque une gymnastique intellectuelle qui fait beaucoup progresser…
Eh bien, c’est Daniel Maja qui a été mon premier commanditaire dans la publicité. Il était directeur artistique des magasins des Trois Quartiers près de La Madeleine. Il m’a commandé ma première affiche. Je l’avais connu au Sauvage, le supplément écologique du Nouvel Observateur pour lequel j’ai dessiné quelques couvertures.
Cela me fait plaisir de savoir que deux artistes que j’admire ont travaillé ensemble…
A l’époque, je n’avais pas trouvé ma voie dans l’illustration des livres. Longtemps, je ne me suis senti ni auteur, ni concepteur, mais illustrateur seulement, et de textes qui ne suscitaient pas mon enthousiasme. En revanche, j’ai pris beaucoup de plaisir dans la presse magazine. Dans des revues du futile comme Marie Claire ou Cosmopolitan, sur des sujets aussi essentiels que les régimes amaigrissants ou les allergies, on peut s’amuser ! Et, en plus, cela payait bien ! Mieux que la presse jeunesse, par exemple.
J’aimerais revenir sur une rencontre qui a beaucoup compté pour moi, celle d’ALAIN LE FOLL qui a été mon professeur aux Arts déco. On ne le connaît plus assez aujourd’hui, même si on a recommencé à parler de lui grâce à la parution d’un « Poche illustrateur » édité par Delpire dont il avait été directeur artistique et chez qui il avait publié deux très beaux livres, SINBAD LE MARIN etC’EST LE BOUQUET !
Il faisait de la publicité, pour les magasins du Printemps ou pour la Deux CV Citroën, et était célèbre à l’époque, mais il est mort beaucoup trop jeune, à l’âge de 49 ans. Je suis resté en contact avec lui après ma sortie de l’ENSAD. Il n’était pas très facile. Lorsque je lui ai montré mes travaux, il s’est montré élogieux pour mes contributions à la presse, mais pour mes premiers albums parus chez Hachette, il a été plus sévère, me reprochant de céder à la facilité.
Il m’a cependant transmis la fierté du métier. Pour lui, l’illustration est un art à part entière, un métier que l’on choisit, et non un sous-produit commercial. Il ne se considérait pas comme un peintre raté, et ne changeait pas de mode d’expression en passant de la littérature de jeunesse aux œuvres pour adultes.
PATRICK COURATIN était le graphiste d’HARLIN QUIST. J’avais eu un coup de cœur pour les livres de cette maison. Le premier que j’ai découvert était LA FORÊT DES LILAS illustré par NICOLE CLAVELOUX qui m’a introduit auprès d’Harlin Quist. J’ai alors compris qu’illustrer des livres pouvait prendre d’autres voies que celles que j’avais explorées jusque là et qui m’avaient laissé insatisfait.
J’ai peu travaillé pour Quist car je suis arrivé peu de temps avant sa faillite : il était peu doué pour les affaires ! Mais j’ai participé à des ouvrages collectifs, Le quatorzième dragon et Le géranium sur la fenêtre. Je devais donner un dessin pour chacun, mais, finalement, pour le premier, il a choisi deux de mes dragons, et dans l’édition américaine, le second est présenté sous un pseudonyme, Tachebel, qui est l’anagramme de mon nom.
Après la faillite d’Harlin Quist, Patrick Couratin a fondé Crapule qui produisait des affiches de spectacles ou d’événements culturels notamment. J’ai créé une ou deux affiches de spectacle pour les colonnes Morris, et édité chez lui la première version de ICE DREAM mise en couleurs par Anne Delobel. J’en avais proposé une version un peu différente à L’ÉCOLE DES LOISIRS qui l’avait refusé parce qu’il n’y avait pas de texte, c’est du moins la raison qui fut invoquée. Le livre a été réédité par Harlin Quist lors de la brève renaissance de sa maison juste avant sa mort. Ce fut mon premier album d’auteur, même s’il était sans texte.
J’avais proposé à Harlin Quist un projet sur les jardins qui aurait pu s’appeler Jardingues. Il n’a pas pu aboutir en raison de la faillite de la maison d’édition. Patrick Couratin l’a, en partie, publié dansOKAPI.
C’est aussi Crapule qui a édité la première version d’Hôtel des Voyageurs, un livre particulièrement réussi…
J’avais alors proposé à Patrick le jeu de mots qui figure dans la réédition du Seuil, entre « voyageurs » et « voyeurs », mais il l’avait refusé. J’ai été plus adroit vingt ans après, et j’ai réussi à lui faire croire que c’était lui qui en avait eu l’idée ! J’ai procédé souvent comme cela avec lui.
C’est ce que j’appelle une tactique conjugale…
La revue HORS CADRES a beaucoup critiqué cette seconde version, mais je trouve la couverture de la réédition bien structurée, sans vulgarité, et cela ne justifiait pas une polémique. Depuis, on a eu l’occasion de s’en expliquer.
Vous avez réussi à glisser un autoportrait parmi les polochons…
Oui, le petit qui arrive toujours en retard et qui ne comprend rien à rien !
Il s’est passé beaucoup de temps entre cet Hôtel des Voyageurs et LE SINGE À BUFFON…
Qu’en avez-vous fait ?
Quelques livres que je préfère oublier, et surtout du dessin de presse. J’en ai fait tellement que j’étais arrivé à saturation, avec pour conséquence un déni total de ce travail. Et puis je me suis vu proposer un poste d’enseignement à l’École supérieure des Beaux-Arts de Cambrai. J’en ai profité pour m’éloigner de ce travail de commande où on finit par perdre toute identité. On obéit à des gens différents qui vous demandent tous des choses différentes, et cela de plus en plus vite. Alors, on ne sait plus ce qu’on veut faire soi-même. Le salaire régulier m’a permis de prendre mes distances. J’ai compris que la seule façon de faire ce que j’avais envie de faire, c’est de créer moi-même mes histoires.
Et cela a été Le Singe à Buffon qui a eu d’emblée LE PRIX DE LA SOCIÉTÉ DES GENS DE LETTRES.
Entre-temps, Patrick Couratin s’était acoquiné avec LE SEUIL JEUNESSE et nos livres ont été des
COÉDITIONS SEUIL JEUNESSE-PATRICK COURATIN jusqu’à sa mort en 2011. C’est une histoire que je conservais dans un tiroir depuis très longtemps. Buffon est un personnage que j’aime bien, d’abord à cause des animaux, et aussi parce que j’avais habité longtemps près du Museum qui a été mon terrain de jeux.
Beaucoup d’illustrateurs le fréquentent, Zaü, May Angeli…
Dans mon enfance, c’était avant qu’il ne soit fermé pour aménager la Galerie de l’Évolution. C’était un musée poussiéreux, plein d’animaux empaillés qui perdaient leur paille. Depuis cette époque-là, Buffon traînait dans un coin de ma tête. L’idée de départ était qu’il recevait un jour un singe dans une caisse. Le singe, au contact des hommes, prenait toutes les tares des humains, et, en particulier, devenait alcoolique. C’était le sujet principal de l’album et la couverture reprend cette idée.
Lorsque j’ai écrit cette histoire, Patrick Couratin ne voulait plus faire d’albums, et le livre est resté dans un tiroir. Lorsqu’il a commencé à collaborer avec le Seuil Jeunesse, nous en avons reparlé. Entre temps, j’avais eu un fils et l’idée a dévié. Le livre a raconté un face à face entre un père et son fils, un père qui n’a pas le mode d’emploi de l’individu qu’il a en face de lui et qui regarde toujours d’un air ébahi ce qui va en sortir. C’est reparti sous cette forme-là. J’ai refait toutes les images dans un style différent. J’ai une tendresse particulière pour cet album, d’abord parce qu’il est dédié à mon fils à qui j’ai emprunté toutes ses bêtises, ensuite parce que c’est le premier album où j’ai osé mettre du texte, des phrases très courtes, très simples, et où j’ai réussi à faire jaillir quelque chose entre le texte et les images.
Et la calligraphie du titre ?
C’est une police de caractère réalisée d’après l’écriture de Cézanne.
Très élégante ! Il y a dans ce livre une belle influence de BENJAMIN RABIER…
Oui, dans l’image du singe. Et j’ai repris chez lui l’alternance de grandes illustrations en pleine page et de séquences successives, en bande dessinée. Il m’a beaucoup marqué dans ma petite enfance. Je l’ai oublié durant de nombreuses années et je l’ai retrouvé aux Arts Déco.
Quand je vais dans les écoles, pour expliquer le rapport texte-image, je montre le Singe à Buffon qui fait pipi dans sa culotte.
Je n’étais pas content d’un dessin de la main du singe et j’ai jeté ma page à la corbeille à papiers.
Je suis partagé. Je suis perfectionniste, mais, en même temps, je cherche à m’évader du travail bien léché, ce que Patrick appelait l’illustration « cul serré ». « Le mieux est l’ennemi du bien avait-il coutume de dire ». J’ai été très marqué par l’illustration de GABRIELLE VINCENT, la liberté de ses coups de pinceau et de crayon. Et finalement, j’ai récupéré l’image dans la corbeille, et j’ai trouvé que, cet aplat de couleur que j’ai jeté « comme ça », il a une espèce de fraîcheur. La fréquentation des œuvres de Gabrielle Vincent m’a permis d’accepter un certain nombre d’erreurs. Mais je retombe régulièrement dans la tendance « cul serré ». Je ne me fais pas assez confiance.
Vous êtes doué pour saisir le mouvement…
C’est l’influence de la BD, de PILOTE, de GOTLIB, de tous ces dessins-là.
J’ai eu beaucoup de plaisir à découvrir Le Singe à Buffon à Montbard, dès l’entrée du MUSÉE BUFFON où il est justement en place d’honneur.
Ensuite est venu le formidable succès de la TRILOGIE DU CHAT. Là, pour le rapport texte-image, vous avez fait très très fort !
Comme souvent, les idées arrivent quand on ne les attend pas, entraînées par des coïncidences.
C’est venu d’un vrai chat que j’ai, qui a maintenant 17 ans. A l’époque, il était particulièrement gros, et surtout particulièrement bête. Moi qui ai toujours vécu avec des chats, j’ai été surpris par le comportement de celui-là et j’ai repris cela dans l’album. Les séquences de la caisse ou des croquettes, je les ai vraiment observées. Je vais faire un livre avec ce chat, dis-je à Patrick Couratin. En même temps, dans le carnet de croquis que je trimballe toujours avec moi, je dessinais des éléphants sans rapport avec cette histoire de chat. Les deux se sont mélangés.
Un matin, j’ai téléphoné à Patrick Couratin que j’ai sorti du lit en lui annonçant : « On garde le texte du chat, mais je vais dessiner un éléphant ». Réponse : « Fais ce que tu veux ! »
C’est précieux de travailler avec un éditeur avec lequel on est proche !
La réception a été épatante, à commencer par le BAOBAB À MONTREUIL.
Le Singe à Buffon a eu un prix, mais n’a pas eu des ventes extraordinaires, mais MON CHAT LE PLUS BÊTE DU MONDE a rencontré le succès dès sa sortie, bien avant le prix de Montreuil où il était déjà en rupture ! Et c’est parti pour une belle aventure…
Pourquoi avoir édité d’abord QUAND MON CHAT ÉTAIT PETIT en petit format ?
Je n’avais pas l’intention de faire une série. Après le succès du livre, il me restait des idées non exploitées dans le premier album. Nous avons eu l’idée d’éditer un bonus en noir et blanc, tout petit, et c’est devenu un album à part entière. Puis il a été refait en grand…
Relié sous jaquette, s’il vous plaît, ce qui prouve la confiance de l’éditeur dans son succès…
Le succès du second a été honorable. Il y a eu moins de traductions étrangères… LE TROISIÈMEsera le dernier : je ne veux pas partir dans les Martine ou les Caroline.
D’où l’extraordinaire litanie des titres possibles qui ne verront pas le jour ! Une parodie très réussie.DES NOUVELLES DE MON CHAT rappelle le tombeau de Jules Verne à Amiens.
C’est ma façon de dire adieu à ce personnage. Et de le changer de décor en le transportant à la campagne, et de lui adjoindre une petite copine. La couverture a été choisie à la dernière minute. Au départ, c’était un auto-portrait, puis j’ai repris une image du livre.
Les éléphants sont aussi présents sur votre Facebook.
Oui, j’ai mis en scène des éléphants de la littérature de jeunesse, notamment POMÉLO, ce qui a été l’occasion d’une bataille de dessins entre BENJAMIN CHAUD et moi. S’est ajouté le COCO deDOROTHÉE DE MONFREID, puis ELMER. Quand on en a eu fini avec Elmer, on s’en est pris au patriarche, BABAR.
Maintenant, je fais plutôt dans les escargots !
Les références culturelles de vos livres sont de haut niveau. Votre CHAMPIGNON BONAPARTE est un chef d’œuvre d’intelligence, de culture, de drôlerie, qui a séduit d’éminents historiens…
Après la parution du livre, j’ai été contacté par Bruno Foucard, directeur de la BIBLIOTHÈQUE MARMOTTAN spécialisée dans le Premier Empire pour exposer les originaux du livre. Je ne savais pas que les historiens pouvaient avoir autant d’humour !
En visitant la bibliothèque, j’ai vu un mur immense, parfait, sans prise de courant, sans radiateur, parfait pour une fresque. Et j’ai réalisé, durant trois mois, une fresque de 3 m sur 14, représentant l’atelier de David pendant l’exécution du Sacre de l’Empereur.
Un somptueux catalogue a été édité, avec des commentaires élogieux de spécialistes de l’épopée napoléonienne comme Jean Tulard…
Patrick Couratin a fait la maquette du catalogue. Le conservateur a fait venir des toiles de musées de province.
Vous avez fait un travail remarquable de documentation…
Je n’étais pas bon en histoire, alors j’ai dû travailler, en particulier pour les costumes.
L’idée est née de la parenté du bicorne avec un chapeau de champignon ?
Au départ, Patrick Couratin, après avoir vu Le Souper de Jean-Claude Brisville au théâtre, m’a proposé de réécrire l’histoire en remplaçant les humains par des animaux. Mais, comme disait Janine, j’ai été inspiré par la forme du chapeau.
En plus de Marmottan, Champignon Bonaparte a été exposé à Ajaccio, et deux fois à Rueil-Malmaison.
Et les autruches ?
Boucle d’or et les trois ours me traînait dans la tête. Mais je n’avançais pas. Je suis allé travailler dans le bureau de Patrick Couratin, pour quelques semaines qui ont duré 7 ans ! Cela m’obligeait à des horaires de bureau. Et là, sous le regard de Patrick, j’ai eu l’idée de remplacer les personnages par des autruches.
LE LIVRE a gentiment marché. Il n’a pas été traduit, contrairement à Mon Chat.
Vous avez dû bien vous amuser !
C’est essentiel ! La part de transpiration et la part de bonheur doivent être équivalentes. Je m’amuse à cacher des petites choses dans les coins. Je fais des ponts d’un livre à l’autre. J’adresse, dans mes images, des messages intimes ou représente des objets qui appartiennent à des personnes que j’aime bien…
Comme la dédicace de MADAME LE LAPIN BLANC ? Un livre féministe plein de tendresse…
Je ne suis pas un militant pur et dur, mais cela fait partie de mon vécu. J’avais vraiment oublié l’anniversaire de mon amie. Et je vais vous raconter le pire. C’est qu’après avoir fait ce livre pour m’excuser, cette année, j’ai encore oublié son anniversaire ! J’étais au festival Étonnants Voyageursà Saint Malo et je n’y ai pas pensé. Il faudra que je fasse un deuxième livre pour me faire pardonner…
Les références au texte de LEWIS CARROLL sont subtiles…
ALICE est un monument. Le texte le plus illustré au monde. Comme tous les illustrateurs, j’ai eu envie de me confronter à ce monument. Mais je ne sais pas dessiner les petites filles. J’étais plutôt mal parti avec Alice. Et puis, pourquoi une énième version ? J’ai choisi un personnage animal emblématique du texte, le Lapin blanc , essentiel et énigmatique. On n’en sait pas grand chose. Je lui ai inventé un foyer, une famille, et j’ai replacé les autres personnages de l’histoire.
Encore un prix à Montreuil….Un chemin pavé de succès…
Pourquoi n’aimez-vous pas parler de vos premiers albums ?
J’en suis globalement insatisfait, même s’ils contiennent quelques images dont je suis content. Le reste n’est que remplissage. C’est décoratif. Ces textes m’ont peu intéressé. Je n’avais pas la maîtrise de l’ensemble. Je ne suis pas auteur. Je n’ai pas eu la chance d’avoir un coup de foudre pour un texte que j’eusse aimé illustrer. Je n’ai pas non plus eu la chance de former un couple avec un auteur, comme FRANÇOIS ROCA avec FRED BERNARD. Je suis incapable d’écrire un grand texte, mais jouer avec le texte et les images, quel plaisir !
Vous êtes accro à Facebook. Ferez-vous un livre de ces dessins ?
Je n’ai pas de livre en cours. Rien, donc, à la rentrée prochaine.
Je m’amuse sur Facebook, très librement, sans soigner mes dessins. Mais je n’ai pas envie d’en faire un album jeunesse, de les édulcorer, de devenir politiquement correct. J’entretiens la machine, c’est tout.
Quelles sont vos références picturales ?
Si je n’ai jamais eu la prétention de faire de l’Art avec un grand A, c’est que je suis plus touché par les arts mineurs. Je suis passionné par le cirque. J’ai été élève d’Annie Fratellini durant un an et demi, alors que j’étais déjà illustrateur.
J’enseigne aux Beaux-Arts. J’ai donc un minimum de vernis et de culture artistique, mais mon intérêt me porte vers les arts populaires, l’Art brut, ce qui est marginal dans l’Histoire de l’Art. C’est pourquoi cela m’a amusé de parodier la peinture d’Histoire dans Champignon Bonaparte.