© Solotareff, 2001
Extrait du catalogue
C’est un honneur et un bonheur de pouvoir accueillir à Margny-lès-Compiègne, pour ce Lire en fête 2001, les tonifiants portraits que Grégoire Solotareff avait présentés, au printemps dernier, à Montparnasse, dans une exposition fort réussie. Sont réunis ici une quarantaine de tableaux sur papier qui ne pourront que réjouir les très nombreux admirateurs de ce célèbrissime peintre-illustrateur à la verve si décapante.
A part deux originaux d’affiches éditées par L’Ecole des loisirs, ces oeuvres sont toutes inédites mais sont souvent des esquisses ou des variantes de dessins imprimés dans les livres.
Il suffit de parcourir la bibliographie jointe pour prendre conscience de l’importance de l’œuvre de Solotareff: importance quantitative, certes, mais aussi intellectuelle et culturelle. De nombreux titres de cette bibliographie ont en effet fait date dans le paysage éditorial et sont connus bien évidemment des spécialistes, mais aussi largement – fait rare en France dans le domaine du livre pour la jeunesse- du grand public. Ainsi en est-il de Loulou, de Matthieu, de Monsieur l’Ogre, du Diable des rochers, de ses Père Noël avec ou sans jumeau…
Importance artistique, également car Grégoire Solotareff est, à la suite de sa sœur Nadja, le créateur d’un style que l’on a souvent tenté d’imiter. Ils ont en effet introduit la peinture dans le livre illustré et il n’est que de regarder les tableaux de cette exposition pour prendre conscience de la vigueur de son coup de pinceau et de la présence chaleureuse, voire même parfois agressive, de la couleur.
Importance idéologique, aussi: les thèmes évoqués et les héros « zoo-anthropo-morphes »qui les illustrent sont audacieux, anticonformistes, ouverts et généreux sans mièvrerie, tendres et fantaisistes sans être superficiels, pudiques et introvertis sans morosité, philosophes et idéalistes sans moralisme ennuyeux et porteurs de messages qui s’adressent autant à l’enfant qu’à l’adulte .
Beaucoup des livres de Solotareff sont créés en collaboration: en famille, avec sa sœur Nadja ou sa mère Olga Lecaye, mais aussi avec des collègues -Kimiko, Alain Le Saux…- à qui il prête volontiers sa plume.
Car ce n’est pas seulement un peintre mais c’est aussi un écrivain de talent dont les textes renouvellent les personnages traditionnels des contes et recréent, avec une grande sobriété de moyens, un univers parfois désabusé, souvent mélancolique, drôle quelquefois, poétique toujours.
La poésie est paradoxalement présente dans les portraits faussement animaliers de notre exposition.
Car, en réalité,- pardon, cher Grégoire, d’oser le penser et en plus de l’écrire!- cette galerie jubilatoire de loups, d’ éléphants, de lapins, d’escargots, de grenouilles, de chiens, de crocodiles, de chats, d’ours…, ne serait-elle pas une façon magistrale (et culottée!) de détourner, par l’humour, le genre de l’autoportrait du narcissisme ringard qui colle trop souvent à cet exercice? Aurais-je identifié le modèle -unique, ô combien- de tous ces tableaux ?
Une très belle exposition, en tout cas, et une invitation très convaincante à se replonger dans vos albums!
Une exposition qui a eu lieu à Salon du livre de Margny-lès-Compiègne
du 19/10/2001 au 21/10/2001