Actus
Des images dans la ville…
5ème Biennale des illustrateurs de Moulins
Pour rien au monde, je n’aurais raté la Biennale des illustrateurs de Moulins. Durant quelques jours, du 26 septembre au 6 octobre 2009, la capitale bourbonnaise a mis à l’honneur, dans douze lieux emblématiques de la ville, les meilleurs illustrateurs de l’édition européenne par des expositions, rencontres, colloque, signatures…
Toute la cité fête l’image et le livre.
Fondée par l’écrivain Nicole Maymat et l’imprimeur Dominique Beaufis, les deux complices qui avaient créé et fait vivre les regrettées éditions Ipomée, la manifestation est animée par les bénévoles, souvent retraités, de l’association des Mal Coiffés. Elle est désormais présidée par Guy Jutard qui délaisse les arts de la scène pour organiser ce festival fréquenté assidûment par des professionnels venus de toute la France, mais aussi de Suisse ou de Belgique.
Cette année, c’était la Cinquième Biennale, déjà : un excellent crû, par le choix des artistes invités et la qualité de leurs expositions. Les scénographies, réalisées par deux illustrateurs, Michel Boucher et Philippe Davaine, étaient en parfaite adéquation avec les différents lieux d’accueil et l’esprit des oeuvres.
Emmanuelle Martinat-Dupré, responsable du mij (musée de l’illustration jeunesse), somptueusement installé sous les lambris du XVIIIème siècle de l’hôtel de Mora, accueillait deux expositions. A l’étage, l’exposition Imaginer, montrait, réunis pour la première fois, les originaux des quatre célèbres imagiers de Katy Couprie et Antonin Louchard, Tout un monde, À table, Au jardin et Tout un Louvre, publiés par Thierry Magnier de 1999 à 2005. Le rez de chaussée était consacré aux œuvres pour la jeunesse de Topor, magistralement présentées par Alexandre Devaux : Charles Perrault, Lewis Caroll, Marcel Aymé, Collodi… Une pièce émouvante évoquait la connivence de Roland avec son fils Nicolas.
Un peu plus loin, dans la rue Voltaire, les gravures de Blexbolex ont trouvé naturellement place, au milieu des presses anciennes, dans le très beau mobilier professionnel collectionné par les Imprimeries Réunies.
A deux pas, une magnifique surprise : sous les ors républicains des salons d’apparat de l’Hôtel de ville, on pouvait découvrir l’œuvre de Nikolaus Heidelbach, trop rare en France, ses truculents portraits de garçons et de filles, et les images des Contes d’Andersen qui oscillent du grotesque au lyrisme le plus subtil, avec un raffinement des techniques que seuls les originaux pouvaient dévoiler.
C’est en déambulant dans un labyrinthe d’un blanc immaculé que l’on pouvait, sous les verrières de l’Hôtel de Département, se laisser gagner par la poésie des albums de l’illustratrice belge Anne Brouillard.
Le très prometteur Adrien Parlange était exposé à la Galerie des Bourbons.
Tout près, en face de la cathédrale où s’accrochaient des héliogravures de Rembrandt, dans l’élégante librairie ancienne Devaux, on pouvait goûter les illustrations sensibles et délicatement sophistiquées de la polonaise Joanna Concejo pour Une âme égarée de Olga Tokarczuk, gratifiée, depuis, du Prix Nobel de littérature.
La jeune et talentueuse japonaise Junko Nakamura qui s’adresse avec tact à la petite enfance, avait accroché ses dessins pleins de fraîcheur aux cimaises de la médiathèque. Et il suffisait de traverser la place pour prendre une goulée d’optimisme et de joie de vivre dans les œuvres de l’inénarrable Gilles Bachelet.
Les grandes toiles et les totems vivement colorés de Laurent Corvaisier s’immisçaient entre les somptueuses sculptures et peintures italianisantes de la Chapelle de la Visitation.
Sur les cours, en extérieur, l’installation éphémère de grands panneaux de Fanette Mellier réinterprétait les fleurs de douze illustrateurs.
Oui, décidément, un excellent millésime…
par : Les Arts dessinés
Revue