Sur la colline (Postface)
Sur la colline de Kota Taniuchi parut d’abord au Japon, publié par Shiko Sha, petite maison dirigée par l’éditeur Takeichi qui a une haute conception du livre d’enfance et souhaite s’adresser à un public « de 0 à 99 ans ». Il fut immédiatement repris en France, sous le titre Là-haut sur la colline (Prix graphique de la Fiera de Bologne, 1969) par Auguste-Marie Cocagnac (1924-2006), dominicain, théologien, exégète de mystiques orientales, peintre, critique artistique, illustrateur, voyageur, résistant, écrivain, musicien, chanteur… Une personnalité d’une exceptionnelle richesse qui a écrit de nombreux textes pour la jeunesse qu’il fit illustrer, aux éditions du Cerf, par des artistes au talent internationalement reconnu, Jean Jacouton, Alain Le Foll, Jacques Le Scanff, Colette Portal, Jozef Wilkon… Directeur de plusieurs collections, il a chassé sur les mêmes terres que des figures aussi différentes que François Ruy-Vidal, Harlin Quist, Pierre Marchand, Régine Lilensten, Jean Fabre ou Robert Delpire.
Au cours de ses nombreux voyages au Japon, le père Cocagnac a découvert, avec émerveillement, les albums de jeunesse nippons. C’est ainsi qu’il a souhaité faire connaître en France l’art de l’album japonais. Il a publié dix albums illustrés par des artistes japonais parmi les soixante-et-onze titres de La Rivière enchantée, collection créée en 1969 et qui perdurera jusqu’en 1993. Il la dirigera personnellement jusqu’en 1972. Chiyo Ono ouvre la série avec Mes deux getas et moi, un chef-d’oeuvre du presque rien, délicat et sensible, non dénué d’humour. Elle sera suivie de Chiro Iwasaki, Kota Taniuchi, Ken Wakayama, Yoko Watari, Tamao Fujita, Rokuro Taniuchi, Kazuo Niizaka…
Alors que, jusque là, Cocagnac confiait ses productions aux antiques Presses Saint Augustin de Bruges, cette collection est imprimée au Japon. Il achète seulement les droits des images à Shiko-Sha Co. Il ne traduit pas le texte initial mais crée un texte très court qui s’inspire des illustrations. En revanche, l’album de MeMo, concocté en étroite collaboration avec Kota Taniuchi, a été réécrit en toute fidélité avec les mots et l’esprit du texte japonais de la première édition, dans l’évanescence esthétique du haïku.
Sur la colline décrit, avec un lyrisme contenu, le songe éveillé d’un enfant qui pédale dans la fraîcheur verte d’un matin calme. Kota Taniuchi, qui vit désormais en Normandie, a publié, au Cerf, deux autres albums d’une inspirante beauté, Le vieux tram (1969) et Qui m’appelle (1971 – Prix « Critici in erba » de la Fiera de Bologne). En face d’un texte minimal perdu dans le blanc de la page, les images de ces trois petits bijoux, d’une suprême élégance, d’une immense sobriété, expriment le silence et la méditation spirituelle, la rêverie, une atmosphère d’attente diffuse, une contemplation muette et sereine.
Du grand art qui parle autant à l’adulte qu’à l’enfant.
Janine Kotwica
MeMo, 2017
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