Etienne Delessert
Fils de pasteur, Etienne Delessert est né le 4 janvier 1941 à Lausanne. Marié à l’auteur-éditrice Rita Marshall, il vit désormais à Lakeville dans le Connecticut mais revient régulièrement en Suisse où lui sont consacrées de très belles expositions.
Après un apprentissage de graphiste à Pully dans le canton de Vaud, il assure la direction artistique de Record et dessine pour Okapi. Avec Anne van der Essen, il crée le studio Carabosse qui réalise des dessins animés pour la télévision suisse, et Sesame Street, des spots publicitaires et des films pour enfants. Il travaille comme graphiste en France, Suisse et aux Etats-Unis. Il est remarqué dès son premier album paru en 1967 chez Harlin Quist à New York, Sans fin la fête, puis par les Contes N° 1 et 2 de Ionesco.
Pour Prophètes et charlatans sur des textes de Bertil Galland et François Nourrissier, Suisse flamboyante écrit par Christophe Gallaz, et pour Le Monde, The New Yorker, The Ne
w York Times, The Atlantic Montly ou Time Magazine, il a dessiné des portraits aux regards d’une intense force psychologique. Il a su capter l’intelligence (Piaget, Spinoza), le charisme (Gandhi, Mandela), la goguenardise (Léautaud) ou la fragilité (Oscar Wilde), le désarroi (Kafka),la superbe (Galilée), la noblesse (Dante), l’insolence (Rabelais) ou encore la force morale (Louise Michel).
Quelques beaux portraits aussi dans ses livres dont il est l’auteur (Les sept nains) d’une richesse métaphorique infinie. La luxuriance tropicale de ses végétations édéniques qui pourrait rappeler le Douanier Rousseau, l’éclat des couleurs, vives et subtiles à la fois, les disproportions anatomiques des personnages humains et animaux, l’audace des mises en page, l’étrangeté des atmosphères, la sensualité gourmande des fruits (Jeux d’enfants), le traitement très personnel des monstres fabuleux (J’aime pas lire! et J’aime vraiment pas lire !), la métaphysique et la morale sous-jacentes (Alerte!) et la mort omniprésente (Qui a tué Rouge-gorge?), exprimés avec des techniques diverses et toujours remarquablement maîtrisées, ont très vite fait de lui une figure majeure de l’illustration dont il défie magnifiquement les codes .
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Son univers est peuplé de souris aux yeux bizarrement illuminés (Comment la souris… créé en collaboration avec Piaget), de fantômes diaphanes ou morbides (Thomas et l’infini sur un texte
remarquable de Michel Déon), d’oiseaux exotiques multicolores, de fleurs éclatantes et profuses (Bas les monstres!), de sombres lapins à la tête énorme (La corne de brume), de scènes médiévales en camaïeu de bruns (Il était une fois la souris), de compositions fantastiques (Chanson d’hiver, de personnages inquiétants et grotesques (Ubu roi d’Alfred Jarry).
Il a revisité des nursery rhymes (La chute du roi) en en démultipliant le sens.
Une passionnante relecture de La Belle et la Bête est parue chez Grasset dans la collection Monsieur Chat qu’il a dirigée et où il a fait travailler les plus grands noms de l’illustration. Le contraste y est saisissant entre la fragilité d’une Belle gracile et l’animalité brute d’une Bête velue et griffue. Aux éditions MeMo, il a publié trois œuvres intimistes, nourries de ses souvenirs et particulièrement émouvantes (Un verre 2013, Cirque de nuit 2015 et Fourru Bourru 2016).
L’ours bleu Mémoires d’un créateur d’images (Sladkine, 2015) croise son parcours personnel avec l’hisroire éditoriale d’un demi-siècle.
Son imaginaire si fertile a inspiré, à Sainte Croix, une étonnante scénographie pour le musée privé de Guido Reuge, maître suisse des boîtes à musique et il a présidé durant quatre ans aux destinées de Ricochet. On lui doit aussi de percutantes affiches.
Quelques grandes rétrospectives de son œuvre ont tourné en Europe et aux Etats-Unis, avec mention particulière à l’exposition du Musée des Arts décoratifs au Louvre en 1975 et de la Library of Congress de Washington DC.
par : Les Maîtres de l'imaginaire