C’est dans son atelier de Montrouge, sous le regard fascinant de masques et de statuettes africaines qu’Henri Galeron me reçoit. Illustrateur provençal, né en 1939 dans les Bouches du Rhône, diplômé en 1961 des Beaux-Arts de Marseille, affichiste à ses heures, il a mis en images de nombreux documentaires et s’est fait connaître pour ses interprétations jubilatoires et décalées de textes littéraires déjantés, oniriques et inattendus. Une rencontre passionnante avec un artiste rare et discret. Par Janine Kotwica.
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Mis en ligne en février 2011 |
« Chacun son tour » Gilbert Laffaille. Éditions des Grandes Personnes et Patrick Couratin 2010 Vous avez participé à Un posthume sur mesure, l’hommage que j’ai rendu à André François et vous avez célébré son anticonformisme en le représentant peignant la tête en bas. Ce portrait ne pourrait-il pas être le vôtre ? Le surréalisme est omniprésent dans vos images. Ce courant a-t-il compté pour vous? Sendak et McKay ont aussi inspiré le graphisme de vos jeunes années. Je pense en particulier àMoka, Max, Mollie et moi… Et Robert Crumb pour Le kidnapping de la cafetière ?
« Les enfants de la lune et du soleil » François David. Éditions Motus 2001 On a parlé quelquefois à votre sujet d’hyperréalisme, à la manière de certains peintres américains. Pour Les enfants de la lune et du soleil particulièrement. Trouvez-vous cette comparaison pertinente ?
« La pèche à la baleine » Jacques Prévert.
Enfantimages Gallimard 1979 Vous avez illustré, de Prévert, le livre mythique de La pêche à la baleine. Etait-ce un choix personnel ou une proposition d’éditeur ? La vue de Trouville, dans Hadji est un clin d’oeil à Savignac ? Vous avez magistralement rendu l’onirisme dérangeant de Kafka. Le pont est une exceptionnelle réussite. C’est vous qui avez souhaité ce travail ?
« L ’homme qui voulait apprendre à marcher aux poissons » d’après Edward Lear.
Éditions Patrick Couratin pour Panama. 2008 En fait, vous vous êtes fait une spécialité des textes «inillustrables», non? Ainsi de Lewis Carroll : vos images de Lettre d’anniversaire m’ont tellement marquée qu’elles se superposent pour moi à jamais au texte ! Lear ? Carroll ? Kafka ? Rien que des écrivains qui évoluent dans un univers fantasmagorique. Cela vous amuse de pervertir les mots, de cultiver les paradoxes, de faire s’entrechoquer texte et image ? Même le texte de Le Clézio, Voyage au pays des arbres, était marginal dans son oeuvre et laissait une grande part à l’onirique. Vous aviez illustré Rabelais mais les grands classiques sont rares dans votre bibliographie. Y en a-t-il d’autres que vous aimeriez illustrer ?
« L ’homme qui voulait apprendre à marcher aux poissons » d’après Edward Lear.
Éditions Patrick Couratin pour Panama. 2008 Vous êtes aussi l’auteur de nombreuses couvertures, de Chair de poule chez Bayard, et des Mille Soleils aussi et beaucoup de Folio chez Gallimard. Lisez-vous les livres avant ? Parole a publié, dans un précédent numéro, votre premier dessin : celui du Géranium sur la fenêtre. Comment avez-vous connu François Ruy-Vidal ? Une autre rencontre qui a compté pour vous a été celle de Pierre Marchand ? Et François David ? Vous avez fait quelques beaux livres chez Motus. Une petite flamme dans la nuitest un livre troublant, sans doute une expérience intense ? L’extravagance des univers de Michel Besnier et Edward Lear est proche de votre monde. Et cette collection (Pommes pirates papillons, toujours chez Motus) est très raffinée par l’élégance de son papier et de sa maquette. Quelles techniques avez vous employées pour ces livres ?
« L’ile du droit à la caresse » Daniel Mermet.
Éditions Harlin Quist 1998 Panama vient de rééditer L’île du droit à la caresse dont l’édition Harlin Quist de 1998 était épuisée. Que pensez-vous de ce très grand format ? Connaissez-vous Daniel Mermet, l’auteur du texte ? Son Là-bas si j’y suis est une émission radiophonique iconoclaste mais peu fantaisiste. C’est souvent une exploration de contrées à problèmes et un forum de contestation, voire de révolte sociale, et certainement pas une annexe de l’Oulipo. Ce texte, avec ses mots-valise et ses néologismes, créatifs et fantaisistes, m’a donc surprise. Comment l’avez-vous découvert ? Qui a eu l’idée de ce livre ? D’où la page si réussie où elle lime ses ongles ?
« L’ile du droit à la caresse » Daniel Mermet.
Éditions Harlin Quist 1998 On a le sentiment que ces barbus sont peints d’après nature… Vous semblez ne pas aimer beaucoup l’école. Comme dans Le géranium, le portrait des orthograves sent la révolte, le refus du conformisme. Je me trompe ? Comment avez-vous trouvé le Tire-l’Arigot, et l’idée de l’île en forme de main ?
Henri Galeron, «un pas comme les autres qui peint dans les nuages».
L’expression est de Jean-Pierre Siméon. Et la forme bizarre des carabs ? |
par : Ricochet
Revue