à Sylvie Neeman
Responsable de la rédaction de Parole
La Porte Moneau, le 1er avril 2005
Ma chère Sylvie
Malgré la date de cette lettre, elle est à prendre au sérieux et j’aimerais que vous trouviez une petite place pour un éventuel rectificatif dans la revue.
En effet, dans la présentation de mon dernier article, voilà que je suis professeure ce qui me choque profondément..
Vous rappelez à juste titre que je suis agrégée de lettres et j’ai effectivement longtemps enseigné la grammaire d’une langue que j’aime et respecte infiniment.
Vous commencez à me connaître et savez que je suis une féministe convaincue, mais aussi très féminine. Or l’ignorance de certaines militantes les couvre de ridicule et je me refuse d’appliquer cette règle nouvelle absurde et infondée .
Ma fonction fut d’être professeur sans e, par pitié !
Le e ajouté à eur ne correspond pas aux règles de la langue française (un masseur, une masseuse- un conducteur, une conductrice) : à la rigueur, s’il fallait à tout prix féminiser, « professeuse » sonne mal et prête à rire, mais au moins est-il conforme aux usages de la langue, de même que « autrice », féminin régulier de auteur !
Cependant, cette féminisation n’a aucune raison d’être. Mes étudiants, collégiens, lycéens puis futurs instituteurs et professeurs ont appris -et transmis à leurs jeunes élèves- qu’il ne faut pas confondre genre grammatical et sexe biologique, qu’une girafe ou une souris sont grammaticalement de genre féminin mais peuvent être biologiquement de l’un ou l’autre sexe, et qu’une sentinelle ou une estafette sont bien souvent des hommes : aux petits de maternelle, j’expliquais qu’il y a des papas souris et des mamans souris et ils le comprenaient très bien ! Lisez à cet égard l’excellent livre de Marina Yaguello Le sexe des mots paru chez Belfond en 1989.
Nonobstant, je vous félicite pour la bonne tenue de ce dernier numéro de Parole et espère que vous ne me tiendrez pas rigueur de ces pinaillages linguistiques !
Pensées très amicales
par :